mardi 6 août 2013

Troyes - Les Champenoises

Tocat

Que reste-t-il comme souvenir de ces spectaculaires mais très fragiles architectures de rubans et de dentelles amidonnées ?
Il y a d'abord, riche d'informations et de précisions, le beau tableau d'Henri Valton daté de 1837 et intitulé Colporteur vendant des châles à des femmes de la région troyenne. Il y a ensuite la gravure de Fichot publiée en couverture de L'Album pittoresque et monumental de l'Aube, paru en 1852. Elle constitue l'autre document pictural qui témoigne du rendu et de la diversité des toquats.
Dès le XVIIIe siècle
S'y ajoutent les descriptions données par les écrivains, à commencer par Pierre-Jean Grosley, chroniqueur et historien troyen, dont l'existence couvre le XVIIIe siècle. En 1774, Dans ses Mémoires historiques et critiques pour l'histoire de Troyes, il cite au chapitre du « vocabulaire troyen », le toquat, ave cette définition : « Coëffure en arrière à l'usage des paysannes. » Pas très explicite, cette définition a le mérite d'attester la présence de cette coiffe dès le XVIIIe siècle et de souligner le caractère régionaliste de son nom qu'on trouve aussi écrit « tocat » ou toccat. La première moitié du XIXe siècle semble avoir marqué l'apogée de la coiffe troyenne dont il est attesté qu'elle était également portée à Rumilly, à Lusigny et Montaulin. Dans le dernier quart du XIXe siècle, le toquat paraît déjà appartenir au passé si on en croit Albert Babeau. Si en 1883, il souligne qu'au même titre que les boucles d'oreilles, les colliers et les croix, « la coiffure est pour les femmes une occasion de déployer leur luxe » et s'il précise que « les environs de Troyes sont fiers de leurs toquats, qui présentent fixées par d'innombrables épingles des sortes de toques, au-dessus et en arrière desquelles s'étale un large cercle de dentelles raidies par l'empois », l'emploi du présent est contrebalancé par le titre de son étude : La vie rurale de l'ancienne France. La coiffe traditionnelle relevait alors déjà de l'ethnologie, supplantée par la mode parisienne devenue incontournable depuis la création des « Grands magasins ». Dans Le guide de l'étranger dans Troyes publié en 1905, Lucien Morel-Payen dépeint le toquat : « Une coiffure en dentelle en forme de roue portée autrefois par les paysannes des environs de Troyes et connue sous le nom de toquat. » Autrefois...
Amidon et épingles
D'après les recherches d'André Beury, fondateur en 1943 du groupe folklorique « Jeune Champagne », le toquat est né de l'évolution du bonnet simple des femmes dont les pans (appelés aussi les barbes) tombaient sur les épaules. Ces barbes se seraient progressivement allongées, élargies et garnies de dentelles pour être ensuite amidonnées puis redressées et épinglées à l'arrière du bonnet. En ce qui concerne la forme, les spécialistes observent trois variantes dans la première moitié du XIXe siècle, ceux que représentent Valton et Fichot : le grand toquat, le toquat rond, et le toquat dit « de Rumilly ». Quelle que soit la version, ils étaient réalisés par les femmes elles-mêmes, paysannes ou bourgeoises : des chefs-d'œuvre de repassage qu'on rangeait très soigneusement d'un dimanche à l'autre.
Les années 1800-1850 marquent sa période de gloire mais en 1880, le toquat est révolu.

Article que l’on a pu lire dans  L'Est Eclair du 12/09/2010



Jeunes champenoises en costumes de fete et coiffées de la fleuriotte dite cathedrale " vieux costumes champenois "
 - Carte postale : éditeur collection Geneviève Devignes photo E. Fautret. La collection complète de cette série est conservée aux Archives départementales de l'Aube, également visibles en ligne.

Geneviève DEVIGNES, née à Suippes en 1890, fut la rénovatrice du folklore et du régionalisme Champenois. André Beury, qui l'appréciait énormément lui a consacré un article dans l'almanach de l'Est-Eclair de 1984, peu après son décès.

Extrait du tableau de Henri Valton

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